Poursuivant ma marche, je me suis surpris à penser que leurs rêves seront peut-être réalisés un jour, mais dans un monde bien différent. Beauce, il y a une trentaine d'années : nous avons oublié d'acheter des œufs et maintenant l'épicerie du village est fermée. Un coup de téléphone au voisin : « Bonsoir monsieur Doyon ! Est-ce que ça vous dérangerait si nous venions vous acheter des œufs ? » « Mais non, voyons ! Combien en prendrez-vous ? » Quelques instants plus tard, chez le voisin, les œufs sur la table, la conversation allait bon train. Mais le plus difficile était à venir : payer ces fameux œufs... Gaspésie, il y a quelques années : j'étais arrivé à un réputé fumoir à poissons une vingtaine de minutes après sa fermeture. Voyant mon air dépité, un voisin qui s'affairait dans son potager me dit : « Allez cogner à la porte de la cuisine derrière la maison que vous voyez là-bas. S'il a le temps, il vous vendra ce que vous êtes venu chercher. » Il avait le temps et je suis reparti pas mal plus tard avec un peu plus que ce que j'étais venu chercher...
Chez bien des producteurs locaux, des heures d'ouverture sont affichées parce qu'il faut bien en mettre. S'ils vous connaissent ou qu'un échange humain intéressant semble possible et qu'ils ne sont pas trop pris à autre chose, les portes s'ouvriront comme par magie. Par contre, vous pourrez dire adieu à la magie la prochaine fois si vous êtes entré en coup de vent et êtes reparti aussitôt vos achats payés. Il doit y avoir plus qu'un échange d'argent.